11 juil. 2011

GAZA-STROPHE, LE JOUR D'APRÈS - De Samir Abdallah & Kheireddine Mabrouk

Certains esprits chagrins semblent avoir trop facilement oublié pourquoi régulièrement des bateaux sont affrétés et veulent rejoindre les côtes de la Bande de Gaza avec à leur bord toute la logistique nécessaire pour venir en aide à une population qui manque de tout ! Revenons sur les faits qui ne datent pourtant pas de la préhistoire : Du 27 décembre 2008 au 18 janvier 2009, le gouverne-ment israélien a lancé une opération militaire de grande envergure sur le territoire de Gaza, son nom : Opération Plomb Durci
Quelle que soit la raison de cet acte de guerre à l'encontre de toute une population, civile ou pas, le bilan est là :
Humain: 1.387 Palestiniens ont perdu la vie lors de l’offensive israélienne selon B’Tselem (une ONG israélienne de défense des droits de l’Homme), 773 civils palestiniens, dont 252 enfants âgés de moins de 16 ans, 330 militants, dont 19 mineurs et 248 officiers de police ont été tués. Ce bilan inclut 36 cas, pour lesquels B’Tselem ne sait pas s’ils sont liés aux hostilités qui étaient en cours. Dans 20 autres cas, B’Tselem dénonce des violations avérées des droits de l’Homme par les soldats israéliens présents: tirs sur civils identifiés ou civils qui servent de boucliers humains. Au moins 5 380 personnes ont été blessées, dont 1 872 enfants et 800 femmes, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS)...

Bilan matériel : Destruction des conduites d'eau et du réseau électrique (les poteaux électriques restants ont été rasés par les bulldozer de Tsahal !). Routes, infrastructures (écoles, hôpitaux), bâtiments officiels et postes de police détruits. Égouts répandus dans les rues après que la principale canalisation eût été touchée par des tirs à plusieurs reprises.Le fuel et le gaz ont disparu des marchés (le terminal de Nahal Oz par lequel transitent les importations de carburant a été fermé depuis le début de l'offensive)
Il y a eu des pénuries de farine, de riz, de sucre, de produits laitiers et de conserves. Les banques ont été fermées en raison d'un manque de liquidités. Le Programme Alimentaire Mondial (PAM) de l'ONU estimait à l'époque que 80% de la population dépendait désormais de l'aide alimentaire.
Actuellement, il n'y aurait pas de "crise humanitaire" à Gaza selon le gouvernement israélien qui multiplient les annonces adressées aux pays concernés par la mise en place de flottilles à destination de Gaza. Le tout savamment orchestré dans un grand show offensif de la diplomatie israélienne.  Mais dans les faits, un blocus persistant et destructeur a été mis en place :
Plus de 70 % des quelque 1,5 million de Gazaouis reçoivent une aide humanitaire internationale, et le taux de chômage, officiellement estimé à 30,7 %, atteint en réalité 45,2 % (l'un des taux les plus élevés du monde), selon l'Unwra, l'office de l'ONU pour les réfugiés palestiniens. Depuis que le blocus de Gaza a été imposé par Israël, le nombre de gens vivant dans une extrême pauvreté (avec 1,5 dollar par jour), a triplé, pour atteindre 300 000 personnes.

Entre novembre 2010 et avril 2011, Israël a accepté un nombre très limité d'exportations gazaouies vers les marchés européens : des fleurs, des fraises, des poivrons et des tomates. Vers le sud, le blocus de Gaza n'a été que partiellement allégé : l'Egypte a annoncé, le 28 mai, l'ouverture du point de passage de Rafah. Mais celui-ci est exclusivement réservé aux mouvements de personnes et ces derniers restent limités.
Les organisations humanitaires et internationales s'inquiètent enfin de la raréfaction des financements des donateurs. Selon le bureau de coordination de l'ONU pour les affaires humanitaires (OCHA), fin mai, seuls 24 % des besoins des territoires palestiniens pour 2011 (estimés à 585,6 millions de dollars, soit 403 millions d'euros), étaient financés. Le premier ministre palestinien, Salam Fayyad, a ainsi annoncé, dimanche 3 juillet, que pour cette raison les fonctionnaires palestiniens ne recevront qu'un demi-salaire en juillet.
Sources :

Gaza-Strophe, des images inédites de l'agression israélienne sur GAZA en janvier 2009. Un film de S.Abdallah et K.Mabrouk
GAZA-STROPHE, le jour d'après... FR [version TV 52mn] from GAZA-STROPHE on Vimeo.




Gaza-Strophe + débat, en plusieurs parties sur Youtube
FILM diffusé sur France Ô + Invité Antoine SFEIR Directeur Des Cahiers De L'Orient

DL [MU] (632 Mo) avec l'entretien sinon le film est disponible sur le site officiel

Rapports de l'OHCHR: Office of the High Commissioner for Human Rights (2 fichiers PDF fr.)
 

Parmi les réactions des "intellectuels et/ou philosophes" en France, du moins ceux qui sont malheureusement incontournables, Bernard-Henry Lévy, Alain Finkielkraut (dont le silence fût pour une fois regrettable), Alexandre Adler, on notera toute la pertinence d'André Glucksmann dans un article qu'il a rédigé le 6 janvier 2009 pour le journal Le Monde et dont voici le contenu dans son intégralité :

Gaza, une riposte excessive ?
Devant un conflit, l'opinion se divise entre les inconditionnels qui ont décidé une fois pour toutes qui a tort et qui a raison, et les circonspects qui jugent en fonction des circonstances telle ou telle action comme opportune ou inopportune, quitte à retenir, s'il y a lieu, leur jugement jusqu'à plus ample informé. L'affrontement à Gaza, aussi sanglant et terrible soit-il, laisse poindre pourtant une lueur d'espoir que les images chocs recouvrent trop souvent. Pour la première fois dans le conflit du Proche-orient, le fanatisme des inconditionnels paraît minoritaire. La discussion chez les Israéliens (est-ce le moment ? Jusqu'où ? Jusqu'à quand ?) roule comme à l'habitude dans une démocratie. La surprise est qu'un semblable débat partage à micros ouverts les Palestiniens et leurs soutiens, à tel point que, même après le déclenchement des opérations punitives israéliennes, Mahmoud Abbas, chef de l'Autorité palestinienne, trouva le courage d'imputer au Hamas, en rupture de trêve, la responsabilité initiale du malheur des civils à Gaza.

Les réactions de l'opinion publique mondiale – médias, diplomates, autorités morales et politiques – semblent malheureusement en retard sur l'évolution des esprits directement concernés. Force est de relever le mot qui fait florès et bétonne une inconditionnalité du troisième type, laquelle condamne urbi et orbi l'action de Jérusalem comme "disproportionnée". Un consensus universel et immédiat sous-titre les images de Gaza sous les bombes : Israël disproportionne. A l'occasion, reportages et commentaires en rajoutent : "massacres", "guerre totale". Par bonheur, on évite à ce jour le vocable "génocide". Le souvenir du "génocide de Jénine" (60 morts), partout rabâché à la va-vite et depuis déconsidéré, paralyserait-il encore l'excès de l'excès ? Néanmoins la condamnation, a priori, inconditionnelle, de l'outrance juive régule le flot des réflexions.

Consultez le premier dictionnaire venu : "est disproportionné ce qui est hors de proportion" soit parce que la proportion n'existe pas, soit parce qu'elle se trouve rompue, transgressée. C'est la deuxième acception qui est retenue pour fustiger les représailles israéliennes jugées excessives, incongrues, disconvenantes, dépassant les bornes et les normes. Sous-entendu : il existerait un état normal du conflit Israël-Hamas que le bellicisme de Tsahal déséquilibre, comme si le conflit n'était pas, comme tout conflit sérieux, disproportionné dès l'origine.

Quelle serait la juste proportion qu'il lui faudrait respecter pour qu'Israël mérite la faveur des opinions ? L'armée israélienne devrait-elle ne pas user de sa suprématie technique et se borner à utiliser les mêmes armes que le Hamas, c'est-à-dire la guerre des roquettes imprécises, celle des pierres, voire à son libre gré la stratégie des attentats-suicides, des bombes humaines et du ciblage délibéré des populations civiles ? Ou, mieux, conviendrait-il qu'Israël patiente sagement jusqu'à ce que le Hamas, par la grâce de l'Iran et de la Syrie, "équilibre" sa puissance de feu ? A moins qu'il ne faille mettre à niveau non seulement les moyens militaires, mais les fins poursuivies. Puisque le Hamas – à l'encontre de l'Autorité palestinienne – s'obstine à ne pas reconnaître le droit d'exister de l'Etat hébreu et rêve de l'annihilation de ses citoyens, voudrait-on qu'Israël imite tant de radicalité et procède à une gigantesque purification ethnique ? Désire-t-on vraiment qu'Israël en miroir se "proportionne" aux désirs exterminateurs du Hamas ? Dès qu'on creuse les sous-entendus du bien-pensant reproche de "réaction disproportionnée", on découvre combien Pascal a raison et "qui veut faire l'ange, fait la bête". Chaque conflit, en sommeil ou en ébullition, est par nature "disproportionné". Si les adversaires s'entendaient sur l'usage de leurs moyens et sur les buts revendiqués, ils ne seraient plus adversaires. Qui dit conflit, dit mésentente, donc effort de chaque camp pour jouer de ses avantages et exploiter les faiblesses de l'autre. Tsahal ne s'en prive pas qui "profite" de sa supériorité technique pour cibler ses objectifs. Et le Hamas non plus qui utilise la population de Gaza en bouclier humain sans souscrire aux scrupules moraux et aux impératifs diplomatiques de son adversaire.

On ne peut travailler pour la paix au Proche-Orient qu'à la condition d'échapper aux tentations de l'inconditionnalité, lesquelles hantent non seulement les fanatiques jusqu'au-boutistes, mais aussi les âmes angéliques qui fantasment une sacro-sainte "proportion" propre à équilibrer providentiellement les conflits meurtriers. Au Proche-Orient, on ne se bat pas seulement pour faire respecter une règle du jeu, mais pour l'établir. On peut à juste titre discuter librement de l'opportunité de telle ou telle initiative militaire ou diplomatique, sans toutefois supposer le problème résolu d'avance par la main invisible de la bonne conscience mondiale. Il n'est pas disproportionné de vouloir survivre.

André Glucksmann est philosophe...




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