19 déc. 2010

LUCIO URTUBIA ... Anarchiste, braqueur, faussaire... et maçon

Une fois n'est pas coutume, pour la biographie de Lucio Urtubia, je suis tombé sur un article d'un certain Paco.
Et là je me suis dit ok, ce qu'a écrit ce mec, c'est au poil pour présenter Lucio, rien à redire. Après, évidemment, il y a le film-documentaire de Aitor Arregi et de Jose-Mari Goenaga, projeté dans le cadre de la campagne de soutien à Georges Cipriani et à Jean-Marc Rouillan. En date du 22 novembre 2010, voici qu'elle était leur situation : "Georges Cipriani est en semi-liberté pour un an depuis le 14 avril 2010. 
C'est une épreuve obligatoire avant l'obtention éventuelle d'une libération conditionnelle.
Jean-Marc Rouillan a eu sa semi-liberté révoquée le 16 octobre 2008 pour quelques lignes d'une interview. Le 27 octobre 2009 il a été transféré à la prison de Muret. Une demande de semi-liberté a été déposée mi-novembre 2009.  Jean-Marc a été transféré à la fin janvier 2010 pour six semaines au CNO de Fresnes (Centre National d'Observation). Le 1er mars il a été transféré à l'UHSI de la Pitié-Salpétrière pour une semaine d'examens médicaux. Il a été depuis de nouveau retransféré à la prison de Muret en attente du rapport du CNO et de l'avis de la commission pluridisciplinaire. A ce jour, sa dernière demande de semi-liberté n'a toujours pas été examinée."


"Il n'était pas bagarreur mais il pouvait être énervant." Satur Urtubia (une des sœurs de Lucio).
Voici l'article de Paco, dont je pense qu'il ne verra aucune objection à sa reproduction sur ce blog !
"Sorte de Robin des Bois du 20ème siècle, Lucio Urtubia, autodidacte insoumis, a une existence bien remplie. Déserteur de l’armée espagnole en 1954, braqueur au bénéfice de la lutte antifranquiste, as des faux-monnayeurs..., c’est en 1979 qu’il monta son coup le plus fumant. Avec l’impression de vingt millions de dollars de faux travellers chèques, il mit tout simplement la plus grosse banque mondiale, la First National City Bank, à genoux et, de derrière les barreaux, il obligea les grands banquiers à négocier ! Une histoire de voleurs volés en somme.

 Lucio lui-même a parfois besoin de se pincer pour être certain de ne pas avoir rêvé cette vie hors du commun… Né en 1931 à Cascante (Navarre) dans une famille pauvre, « une chance », Lucio n’est pas un faussaire ordinaire. Le pape des faux papiers et de la monnaie de singe a une morale en béton : l’illégaliste ne travaillait que pour soutenir et financer les groupes libertaires et révolutionnaires. Selon les époques et les circonstances, tous ceux qui combattaient les dictatures et les puissants (CNT, ETA, GARI, MIL, Tupamaros, Montoneros, Black Panthers, Action Directe...) pouvaient bénéficier des œuvres (faux, tracts, journaux…) de ce franc-tireur internationaliste. Ernesto Guevara, alors ministre cubain, aurait pu ainsi réussir une belle affaire en 1962. Dans un coin de l’aéroport d’Orly, Lucio lui proposa d’inonder le monde avec des faux dollars pour dévaluer la monnaie américaine. Le Che refusa. Dommage.

 Parallèlement à ces heures fascinantes, pour vivre, bien modestement, Lucio n’a jamais cessé d’exercer le métier de maçon carreleur. Curieux homme ce Lucio. Prolétaire au plus profond de ses tripes, il a aussi eu l’occasion de fréquenter des personnalités comme Régis Debray, Paco Rabanne ou Roland Dumas (qui fut l’un de ses avocats). Écouter Lucio autour d’un verre, c’est tourner les pages d’un grand livre d’histoire contemporaine. Comme personne, il parle des conférences que donnait Albert Camus pour les libertaires, de l’enseignement reçu de Francisco « Quico » Sabaté (célèbre guérillero anarchiste espagnol), des batailles féroces contre les « estaliniens », de ses rencontres électriques avec des gens comme Korda (auteur de la fameuse photo du Che) ou amicales avec Henri Cartier Bresson, Armand Gatti et bien d’autres.


Infatigable, Lucio n’a pris sa retraite du bâtiment qu’à 72 ans. L’anar qui fut « patron malgré lui » d’une petite coopérative ouvrière, n’hésite pas à faire l’apologie du travail. « Pour se loger, s’habiller, se nourrir, il faut travailler. Le moins possible et le mieux possible. Et ça peut se faire dans la liberté, l’égalité, la solidarité et le plaisir. J’ai dû travailler dur pour gagner ma liberté. La liberté n’a aucun sens dès lors que l’on refuse tout effort. Après, je ne suis, bien évidemment, pas partisan du travail tel qu’il existe dans les sociétés capitalistes où le travail du plus grand nombre ne profite qu’à une minorité. »




 Retraité du bâtiment, Lucio n’a mis ni ses pieds ni ses idées à l’hospice. Au passage, il énerve souvent les « chômeurs heureux » qui prônent l’abstinence salariale. « Si le chômage produisait des révolutionnaires, il serait interdit depuis longtemps !, s’époumone Lucio. Donner un peu d’argent à ceux qui ne travaillent pas, quel mépris... Les allocations sont des suppositoires qui endorment les révoltés. Il ne faut rien attendre de l’État, rien des capitalistes. Il ne faut compter que sur nous. Alors, prenons nos responsabilités pour abattre ce monde insupportable ! »

 Amateur d’art et de débats, Lucio Urtubia a créé en 1996, à Paris, un lieu de rencontre et d’expositions au 42 ter rue des Cascades, L’Espace Louise-Michel, son dernier chantier. Une adresse mentionnée dans certains guides touristiques. Hélas, on ne peut plus y trouver son livre, Ma Morale anarchiste, publié par les éditions Libertaires. L’ouvrage, Grand Prix Ni dieu ni maître 2005, est épuisé. L’anarchisme serait dans l’air du temps... « C’est normal que les idées libertaires reviennent en force, elles sont nécessaires », insiste Lucio, 79 ans au compteur.

 Bandit pour les uns, héros pour les autres, le malicieux Lucio a le profil idéal pour tout scénariste en panne d’inspiration. Il a refusé plusieurs propositions de film, mais, pour notre plaisir, il a accepté d’être le sujet d’un superbe documentaire. À l’aide d’archives historiques, de documents autobiographiques et de séquences docu-fiction, Aitor Arregi et Jose-Mari Goenaga reviennent sur les amitiés, les combats, les braquages, les enlèvements, la fausse monnaie, la prison et… l’incroyable négociation avec la City Bank. Sacré jeu de piste pour les deux jeunes réalisateurs basques. Ils ont tourné quatre-vingts heures de rushes pour ne garder que quatre-vingt-treize minutes.

 « Je me sens de plus en plus fier de ce que j’ai fait dans ma vie », assure Lucio, par ailleurs bon père de famille. Sa trajectoire peut faire grincer quelques dents, mais contrairement à certains moralistes gouvernementaux, rappelons pour conclure que ce personnage attachant ne s’est jamais enrichi personnellement. Question de morale... anarchiste."

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